En moins de deux mois d’entraînement, la Paralympienne canadienne Lauren Barwick de Reddick (Floride) a propulsé Sandrino jusqu’au niveau FEI en tant que monture de paradressage.
Source : Susan J. Stickle
Lauren a commencé à monter avec le Westphalien (Spirit of Westfalia x Pavarotti) de huit ans le 24 novembre 2019. Ils avaient un délai très court pour l’inscrire à temps aux compétitions internationales pour se qualifier pour les Jeux paralympiques de Tokyo de 2020. En plus de l’entraînement habituel des mouvements et des épreuves, Lauren et son assistante, Erin Paul, devaient accélérer l’entraînement de Sandrino pour les besoins spécifiques de Lauren en tant qu’athlète de catégorie 3. En 2000, un accident a paralysé Lauren à partir de la taille. Pour aider ses jambes, elle utilise sa voix et deux fouets de dressage comme aides adaptées approuvées par la FEI.
La première étape du processus a été de réapprendre à Sandrino à utiliser les fouets de dressage ou les « bâtons », comme Lauren préfère les appeler. « Le cheval doit savoir qu’il ne va pas être réprimandé avec les bâtons et qu’ils ne sont qu’une aide, explique-t-elle. Alors, nous le frottons avec et nous les portons sans les utiliser beaucoup au début. Nous commençons aussi à les utiliser au sol pour qu’il puisse comprendre comment s’en éloigner sans que je sois en selle. Si un cheval est sûr de lui au sol, il comprendra facilement en selle. Ensuite, nous utilisons le bâton comme nouvelle aide et nous reprenons l’ancienne aide. Donc, on utilise les bâtons, puis la jambe. Finalement, nous devons de moins en moins utiliser la jambe. »
Les fouets de dressage sont destinés à transmettre des commandes pour le mouvement latéral, plutôt que pour le mouvement vers l’avant. Quand le mouvement vers l’avant est demandé, c’est alors que les commandes vocales de Lauren entrent en jeu.
« J’entraîne mes chevaux à un claquement de langue pour le trot et deux claquements pour le galop. Les deux claquements ont leur raison d’être puisque le premier est un son pour alerter et le second est le commandement. Bien sûr, j’utilise mon corps et mon assise pour suggérer que quelque chose va se produire. Pour plus d’allure sur le parcours, comme une extension au trot sans passer au galop, je leur apprends à avancer à partir d’un bruit de baiser. Je deviens très douée pour faire ces sons et quand mes assistants commencent à monter mes chevaux, je leur dis qu’ils doivent commencer à embrasser davantage leur petit ami ! C’est donc la même chose : on commence avec le bruit, puis les bâtons, puis l’ancienne aide qu’ils connaissent. Nous enseignons aussi cela sur le terrain. L’autre aide vocale que j’utilise est l’expiration, elle signale de ralentir ou de s’arrêter. Nous faisons le tour des cônes, des barils, des arbres et des lignes de clôtures et nous nous arrêtons pendant que je fais une grande expiration. C’est un peu comme une commande vocale non apparente. »
Lauren et Erin ont commencé à élaborer tous ces concepts dès leur première semaine avec Sandrino. En un rien de temps, il était temps de participer à leur première compétition : un concours national qui servait d’épreuve de qualification pour l’AGDF.
« Normalement, je n’essaierais jamais de préparer une épreuve en si peu de temps, raconte Lauren. Je donnerais plutôt au cheval le temps d’apprendre à se passer de l’usage de mes jambes. Il y a de beaucoup d’étapes à notre épreuve technique et nous avons simplement dû faire ce qu’on pouvait pour participer à la compétition. »
Le programme a fonctionné, car Lauren et Sandrino se sont qualifiées pour l’AGDF. En se concentrant sur la compétition internationale, ils ont ensuite ciblé les mouvements techniques ayant les coefficients les plus élevés pour optimiser leurs chances d’obtenir un pointage élevé. Pour l’épreuve CPEDI 3* Grade III, ces mouvements comportaient des cessions à la jambe et des serpentins de trois et de quatre boucles se tenant de trois à cinq foulées au pas en moyenne de la ligne centrale.
Lauren et Sandrino ont axé leur entraînement sur les mouvements techniques ayant les coefficients les plus élevés.
Source : Susan J. Stickle
« Le serpentin de quatre boucles est assez difficile à réaliser, car nous sommes dans un manège de 20 x 40 m, ça veut dire que nous faisons un demi-cercle de 10 m puis nous marchons et répétons, explique-t-elle. Pour certains chevaux expérimentés, ils peuvent se mettre un peu à l’aise et penser à des pas de galop ou de piaffe. Pour nous, le rendement des jambes a fini par être la chose la plus difficile à effectuer. Quand j’ai touché Sandrino avec le bâton, il a pensé au galop. Je retenais mon souffle chaque fois que je devais les faire. »
« J’essaie de réussir la halte le plus tôt possible puisqu’il y en a trois dans l’épreuve, indique Lauren. Les haltes sont un défi pour moi puisque je n’ai aucune sensation à partir des hanches et je n’arrive pas à savoir si les pattes arrières du cheval sont bien alignées. S’il ajuste une patte arrière pour se redresser, je ne le sens vraiment pas. Je dois avoir un cheval qui est très honnête à propos du redressement. J’ai de bons entraîneurs et assistants qui comprennent ce que je recherche en termes de sensation et de synchronisation. Le soutien technique d’Équipe Canada a été formidable pour m’aider à ajuster mes attentes pour qu’elles soient réalistes. On m’a rappelé de garder la formule simple et de renforcer la confiance de Sandrino. Il n’a que huit ans. »
Malgré les nombreux éléments à prendre en compte et à pratiquer, l’entraînement était en fait le cadet des soucis de Lauren. Le duo était également confronté au problème très courant de l’ajustement de la selle. Les selles de Lauren sont spécialement adaptées pour qu’elle puisse garder son équilibre, mais Sandrino se sentait restreint avec ses options de selles. Lauren a donc utilisé une selle qui convenait bien à Sandrino, mais qui ne convenait pas très bien à ses besoins à elle.
Après avoir affronté les problèmes complexes d’entraînement en quelques semaines seulement et s’être accommodé du matériel dont il disposait, Sandrino a fait ses débuts FEI sous les projecteurs de l’AGDF 1. Le 9 janvier 2020, Lauren et lui ont obtenu un résultat de 69,500 % à l’épreuve CPEDI 3* Grade III par équipe. Deux semaines plus tard, le duo est revenu pour l’AGDF 3. Ils ont inscrit leurs deux premières victoires et le premier résultat au-dessus de 70% de Sandrino. Ils ont obtenu un impressionnant 75,133% pour la reprise libre CPEDI 3* Grade III du 25 janvier.
En dépit d’une multitude de défis, Lauren et Sandrino ont déjà remporté deux victoires dans les premières semaines de leur carrière internationale.
Source : Susan J. Stickle.
« Il faut s’amuser avant tout et je pense que Sandrino a cette étincelle. C’est un cheval super intelligent et il a un esprit et un tempérament franchement exceptionnels. Il est peut-être un peu exubérant, mais il veut vraiment être obéissant. Ces traits de sa personnalité et notre relation feront de nous une équipe gagnante », conclut-elle.