Face à un tel nombre, la gestion de la santé et du bien-être des chevaux en compétition devient une tâche monumentale. Cette énorme responsabilité incombe en grande partie aux vétérinaires officiels de la FEI, qui travaillent sur le terrain lors des compétitions internationales pour s’assurer que nos athlètes équins sont en bonne forme pour faire de la compétition.

Pour en savoir plus sur le poste, Canada Équestre (CE) s’est entretenu avec trois Canadiens qui détiennent le titre de vétérinaire officiel de la FEI dans plusieurs disciplines : Dr Alan Manning d’Erin (Ontario), Dr Bernd Stanglmeier d’Utopia (Ontario) et Dr Yves Rossier de Saint-Hyacinthe (Québec), qui agit aussi comme vétérinaire en chef national pour le Canada depuis 2009.

Horse People Turned Healers: QandA With Canadian FEI Official Veterinarians

Canada Équestre s’est entretenu avec trois vétérinaires officiels canadiens de la FEI afin de savoir ce qu’il faut faire pour assurer que les chevaux soient en bonne condition physique pour la compétition au plus haut niveau du sport.
Dans le sens horaire à partir de la gauche : Dr Yves Rossie, Dr Alan Manning et Dr Bernd Stanglmeier
Source : Betty Cooper, Cealy Tetley, CÉ


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CÉ : Quel est votre parcours professionnel?

A.M. : J’ai travaillé avec de chevaux de saut d’obstacles jusqu’à ce que j’entre à l’école vétérinaire. J’ai obtenu mon diplôme du Collège vétérinaire de l’Ontario en 1990 et j’ai travaillé dans une pratique qui faisait pas mal de travail d’élevage, de test de boiterie pour les chevaux de concours, ainsi que de chevaux de course. Environ cinq ans plus tard, j’ai commencé ma propre pratique et je le fais depuis maintenant presque 28 ans, me concentrant principalement sur les problèmes de boiterie dans le sport et les chevaux de concours. J’ai deux associés, et nous élevons aussi nos propres chevaux que nous dressons, avec lesquels nous faisons de la compétition et que nous vendons, donc il y a quelques facettes différentes à nos installations.

B.S. : Je viens de l’Allemagne et j’avais l’habitude de faire des concours de chevaux. Vous arrivez à un âge où vous devez décider ce que vous voulez faire, alors à un moment donné, j’ai décidé que si je pouvais joindre mon passe-temps à ma profession, ce serait l’idéal. Je suis devenu vétérinaire en Allemagne, puis, en 1985, je suis arrivé au Canada. J’ai fait un stage à l’Université de Guelph, j’ai passé mes examens pour l’Amérique du Nord, puis j’ai commencé dans des cliniques locales. J’ai ouvert ma propre pratique en 1990. J’ai commencé à m’occuper d’abord de l’attelage, puis j’ai commencé à travailler avec le saut d’obstacles, le dressage et le concours complet, et j’ai tout simplement continué depuis ce temps.

Y.R. : Je suis professeur à l’école vétérinaire de l’Université de Montréal. Ma spécialité est celle des problèmes liés au sport ; boiterie, examens préachat, mauvaise performance, et dernièrement toutes les techniques d’imagerie comme l’IRM et les nouvelles modalités qui se rapportent aux problèmes sportifs. Je suis vétérinaire de la FEI depuis environ 1993, et j’ai participé à de très nombreux événements, en commençant à Bromont dans les premiers jours, puis aux Jeux équestres mondiaux FEI en 2014 et 2018. J’ai moi-même un passé équestre et je continue à aimer ça.

CÉ : Quelles sont les responsabilités d’un vétérinaire officiel de la FEI pendant une compétition?


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Y. R. : Notre préoccupation première est d’assurer la biosécurité de notre environnement. Lors de chaque événement FEI, chaque cheval passe un examen physique à son arrivée sur place pour s’assurer qu’il n’a pas de fièvre ou qu’il ne présente pas de risque pour les autres chevaux. Nous essayons d’avoir le meilleur environnement possible en termes d’écurie et d’eau – je pense que la plupart des organisateurs le comprennent, mais vous devez vous assurer qu’il est entretenu et organisé.

L’évaluation du bien-être et de l’état de santé des chevaux pour s’assurer qu’ils sont aptes à la compétition est probablement la deuxième plus grande préoccupation après la biosécurité. Chaque discipline a des exigences et des risques différents, et vous essayez de les atténuer du mieux que possible. Certaines disciplines sont plus axées sur la forme physique pour performer au plus haut niveau. En conduite, en endurance ou en concours complet, vous y ajoutez la résistance, le conditionnement et la fatigue, et ceux-ci font partie intégrante de la compétition. Je pense que nous avons fait de grands progrès dans la compréhension de ce dont les chevaux ont besoin pour rester en bonne forme physique pour la compétition.

B. S. : Tout est pour la santé et le bien-être du cheval. Nous faisons une préinspection au cours de laquelle nous examinons le cheval et nous vérifions s’il est blessé. Parfois, il faut faire des corrections sur leurs passeports – s’il s’agit de corrections majeures, il faut les envoyer à la fédération nationale. Ensuite, on regarde le cheval au trot et on s’assure qu’il va bien. Pendant la compétition, l’essentiel est de rechercher les blessures. Nous collaborons avec le jury de terrain et les commissaires pour faire nos rondes dans la grange, demander aux gens si tout va bien et regarder à nouveau leurs chevaux, juste pour maintenir la santé et le bien-être des chevaux. Nous le faisons tout au long de la compétition et nous espérons qu’elle se terminera sans accident pour le cavalier ou le cheval. Ensuite, nous avons un grand concours, qui constitue notre principal objectif.

Y. R. : De toute évidence, le contrôle antidopage est très important, non seulement pour dissimuler les blessures, mais aussi pour s’assurer que personne ne tente de modifier les performances du cheval autrement que par des moyens et des entraînements normaux. Cela sera toujours présent.

CÉ : Qui est impliqué dans la procédure vétérinaire?

B. S. : Pour un grand concours, il y a le président de la Commission vétérinaire, le vétérinaire étranger, puis un vétérinaire associé de la FEI, donc toute la commission est composée de trois vétérinaires.

A. M. : Nous avons aussi les vétérinaires de l’équipe, et si des problèmes surviennent, alors le vétérinaire traitant sera également impliqué. Nous devons communiquer avec eux assez régulièrement tout au long de la journée et même le soir si des problèmes surgissent. Nous avons des radios entre nous tous, et nous nous rencontrons le matin pour voir s’il y a du nouveau. Pendant le trot, nous sommes tous là pour donner un coup de main. Habituellement, deux d’entre nous s’échangent pour faire un cheval ou un autre parce que quand vous avez 150 chevaux, ça devient mentalement épuisant. Ensuite, un troisième vétérinaire s’occupe de la boîte de cale, donc s’il y a un problème, nous avons quelqu’un pour effectuer la cale et nous donner des renseignements. Et il n’y a pas que les vétérinaires – le jury de terrain est là aussi, parce qu’il a son mot à dire sur l’aptitude de ces chevaux à la compétition. Ça marche plutôt bien malgré qu’il y a beaucoup de choses à faire en même temps.

CÉ : Que recherchent les vétérinaires pendant le trot?

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A. M. : Nous recherchons des chevaux d’apparence saine pour commencer. Nous faisons un examen sommaire rapide sans toucher le cheval pour voir s’il y a des bosses ou de l’enflure avant que le cheval ne participe à la compétition, et elles sont notées, alors si quelque chose arrive, nous avons une note qui indique si elle était déjà présente ou pas. Nous regardons ensuite les chevaux en trot sur une piste assez courte. C’est un examen assez rapide du cheval – ce n’est pas un examen préachat, c’est juste un trot rapide pour voir si le cheval est à niveau dans son suivi. Chaque cheval bouge différemment du cheval avant ou après, c’est juste pour s’assurer qu’il n’y a aucun signe de malaise qui pourrait affecter la capacité du cheval à la compétition.


Au trot, quand on vous dit de tourner à droite, tout le monde se demande pourquoi. Et ça, c’est pour voir le cheval et non la personne qui le dirige!

CÉ : Quelles sont les caractéristiques qu’un vétérinaire doit posséder pour réussir dans ce rôle? 


B. S. : L’essentiel, c’est votre personnalité. Soyez vigilant, parlez aux gens, expliquez-leur et soyez à leur disposition, ce qui est parfois très difficile. Les gens savent immédiatement si vous aimez les chevaux. Si vous avez un contact avec les chevaux et que vous pouvez travailler avec eux, c’est la meilleure chose qui puisse arriver si vous voulez être un vétérinaire équin. C’est très difficile d’être un vétérinaire équin si vous ne l’avez pas, ce sentiment spécial que je ne peux pas expliquer, mais tout le monde qui aime les chevaux le sait – soit vous l’avez ou vous ne l’avez pas.

A. M. : Juste être impliqué dans l’industrie. Les gens de l’industrie des concours hippiques savent ce que représente une compétition FEI, comment elle est réglementée, et les vétérinaires qui y participent. Cela prend du temps ; il faut passer du temps avec différents vétérinaires dans les concours hippiques, il faut les suivre, puis suivre un cours et passer un examen à la fin de celui-ci pour être certifié. Il faut renouveler tous les quatre ou cinq ans.

Y. R. : Quand nous faisons le travail de la FEI, c’est pour s’assurer que le bien-être d’un cheval est maintenu pendant la compétition. Vous essayez de le faire d’une manière vraiment juste et respectueuse pour les chevaux et les gens. Vous devez comprendre la compétition et ce que l’on demande aux chevaux et aux cavaliers, donc je pense que le fait d’avoir un vécu en équitation aide vraiment à comprendre ce que le cheval et le cavalier vivent réellement.

CÉ : Quels sont certains des défis de la médecine vétérinaire équine?

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B. S. : Les chevaux pur sang ont des problèmes différents de ceux des standardbred, et ensuite les chevaux de trait ont aussi des problèmes différents. C’est donc très intéressant, et chaque jour vous en apprenez davantage. Il n’y a pas de jour où tu n’apprends pas quelque chose.

Y. R. : Ce qui est nouveau, c’est que les chevaux voyagent beaucoup maintenant et qu’il y a tant de compétitions. Les chevaux de saut d’obstacles peuvent faire de la compétition chaque semaine dans le monde entier, ce qui signifie voyager, faire de la compétition tout le temps, ne jamais être à la maison, etc.

A. M. : Cela vous prend beaucoup de temps. Si vous avez de très bons employés et une femme qui vous pardonne parfois, la vie est bien meilleure. C’est difficile parce que tous les engagements de la FEI sont le week-end. C’est mieux maintenant que les choses ont changé dans les règlements de la FEI : vous ne pouvez faire que deux concours équestres consécutifs et vous devez prendre un congé, alors cela fait en sorte que des gens plus jeunes ou différents viennent dans ce secteur.

CÉ : Qu’est-ce que vous aimez dans le fait d’être un vétérinaire de la FEI?

B. S. : J’adore voir des chevaux. J’adore voir naître des chevaux qui vont ensuite faire de la compétition. Je fais encore du cheval avec ma femme tous les jours, c’est l’essentiel – les chevaux me permettent de rester actif.

Y. R. : Vous aimez voir tous les gens, les chevaux et le sport ; c’est ce que les chevaux aiment faire, faire de l’exercice et faire des choses. C’est formidable de les voir accomplir ce qu’ils sont censés faire d’une manière sécuritaire et saine.

CÉ : (En 2018, le Dr. Rossier a été élu pour un mandat de quatre ans au Comité vétérinaire de la FEI). Quelle est l’importance de participer aux comités de la FEI?

Y. R. : Le Comité vétérinaire de la FEI est un comité composé de six membres qui se réunit deux fois par an pendant environ trois jours pour passer en revue tous les changements de règlementations, problèmes et questions survenus et comment on peut les prévenir ou aider à y faire face. Il y a tant de choses parce qu’il y a sept disciplines et qu’elles ont toutes des problèmes différents. Je fais aussi partie du comité de l’enseignement vétérinaire de la FEI et j’y ai siégé entre 2010 et 2014. Nous avons maintenant des techniciens de test, des vétérinaires et des physiothérapeutes, de sorte que tous ces groupes doivent interagir, se comprendre et être mieux formés. L’éducation est si importante dans le domaine.

Je pense qu’il est extrêmement important de faire partie de ces comités parce que c’est là que les problèmes mondiaux sont discutés. Dans le sport équestre à Hong Kong, en Norvège ou dans le sud des États-Unis, vous avez le même concept, mais des problèmes différents en raison du temps, de l’environnement social et culturel, etc. C’est fascinant de comprendre et de faire face à cela, mais on comprend mieux ce que fait la FEI et pourquoi les règles sont différentes. C’est incroyable de voir un ensemble de règles qui s’appliquent à toutes les disciplines et à tous les endroits du monde.

Pour plus d’informations sur le rôle des vétérinaires officiels de la FEI, visitez le site https://inside.fei.org/fei/your-role/veterinarians.