Rédigé selon la matériel soumis par Elke Hollenbach, Sandra Ammonn, Lindsay Paulsen et Bruce Mandeville.

Mis à jour le 20/12/21

Le 24 novembre 2021, lors d’un matin frisquet, Larissa, l’un des meilleurs chevaux de concours complet du Canada, est paisiblement décédée, entourée de sa famille et de ses amis. La Trakehner américaine enregistrée de 32 ans a été élevée chez ses propriétaires, Franz et Elke Hollenbach. Elle était une extraordinaire athlète équine canadienne.

Les Hollenbach ont quitté Munich (Allemagne) pour s’installer au Canada en 1980. Originaire de la Prusse, le berceau de la race Trakehner, Elke, la matriarche, a décidé d’élever ces magnifiques chevaux warmblood avec sa famille dans son nouveau pays d’accueil. En 1981, ils ont acheté une Trakehner pleine pour ce qui allait être le début de leur programme d’élevage à Long Lane Farm (Puslinch, Ontario). Leur premier poulain, Target, est éventuellement devenu le père de Larissa. Cette dernière a vu le jour le 20 février 1989 de la jument Lagune VII (par Hemmingway), arborant une magnifique robe alezan brûlé.

De par sa conformation inhabituelle et ses particularités physiques, dont le pied bot et la scoliose, Larissa ne semblait pas destinée à devenir une candidate olympique dans sa jeunesse. « Au début de sa carrière, je pense que personne ne croyait vraiment qu’elle réussirait », a déclaré Bruce Mandeville, son partenaire de longue date en concours complet. « Puis, grâce à de l’entraînement et une gestion minutieuse, le mouvement de Larissa sur le plat et son athlétisme au saut d’obstacles ont commencé à se faire remarquer. »

La jument a commencé son ascension très tôt en remportant, à l’âge de cinq ans seulement, de multiples épreuves au niveau Préliminaire. Elle a ensuite fait équipe avec M. Mandeville et a enchaîné les concours Intermédiaire durant plusieurs années avant de représenter le Canada aux Jeux panaméricains de 1999. Alors âgée de dix ans, la jument a décroché la neuvième place et a été la seule membre de l’équipe canadienne à compléter toutes les phases. L’athlète et son cavalier ont ensuite fait leurs débuts olympiques aux Jeux de Sydney 2000, où ils ont obtenu la 22e place. Ils étaient d’ailleurs l’un des trois seuls couples ayant réussi la phase de saut d’obstacles sans faute. Plus tard cette année-là, Larissa a été nommée « Jument de l’année » par la United States Combined Training Association (maintenant nommée la United States Eventing Association).

La jument est demeurée au sommet aux Jeux équestres mondiaux de 2002 grâce à un parcours de cross-country impeccable, qu’elle a livré sous la selle de M. Mandeville, de même qu’aux Badminton Horse Trials de 2003 (Angleterre), où elle a franchi avec succès le Vicarage V, l’un des obstacles de cross-country les plus mythiques et les plus intimidants au monde. « Je me rappelle être arrivé et m’être dit que ça allait être extraordinaire. Et ce fut le cas. Elle l’a sauté facilement, et c’était tellement super que j’ai levé un poing en l’air après l’obstacle! » a révélé M. Mandeville.

Lors d’épreuves internationales, autant dans les championnats du monde qu’aux Jeux olympiques, tout le monde, officielles et officiels de la FEI y compris, laissait la voie libre lorsque la jument entrait dans la stalle des 10 minutes. « Elle avançait à son rythme et personne ne la touchait », a expliqué Sarah Howells, sa palefrenière de longue date, avant d’ajouter en riant : « Nous restions dans un coin et disions aux personnes moins habituées de rester à l’écart ». Cette mentalité emplie de détermination a forgé la personnalité complexe de la grande jument, qui démontrait une puissance irrépressible sur les parcours les plus difficiles du monde.

Larissa a continué à démontrer sa supériorité en remportant la médaille d’argent par équipe aux Jeux panaméricains de 2003, à Santo Domingo. Elle a ensuite pris part à ses deuxièmes Jeux olympiques avec M. Mandeville, en 2004 à Athènes (Grèce) où elle a terminé au 12e rang de l’épreuve par équipe.

Le surnom « dame de fer » lui a été attribué parce qu’elle était fougueuse, solide et toujours prête à prendre le départ. Larissa a pris sa retraite à l’âge de 16 ans avec 54 étoiles dans son passeport FEI et des épreuves allant jusqu’au niveau 3 étoiles à son actif. « Larissa était vraiment spéciale », a déclaré M. Mandeville. « Sa carrière était mémorable. Elle se surpassait chaque année. » L’athlète, qui est connue comme l’une des meilleures juments de l’histoire de concours complet canadienne, a vécu sa retraite à Long Lane Farm.

Horse of the Month: Larissa, Canada’s “Iron Lady”

Larissa est demeurée chez les Hollenbach jusqu’en 2020, lorsque les propriétaires ont dû vendre Long Lane en raison de leur âge. Leur fille, Elke Jr., avait pris les tâches de l’écurie en main et a commencé à chercher une nouvelle maison pour Larissa, qui était alors âgée de 31 ans, et sa compagne, Helena. Elle a confié la recherche à son ami de longue date, le vétérinaire Dr Robert Yantho, qui connaissait cette Trakehner bien spéciale depuis sa naissance.

Dr Yantho a communiqué avec son amie Sandra Ammon, une éleveuse et entraîneure de Sanmar Friesians (Elmira, Ontario), pour savoir si elle avait de la place pour deux chevaux de plus à son écurie. Mme Ammonn a accepté sans hésitation. Elle a rencontré la famille et a commencé à planifier le déplacement des juments.

En raison de la personnalité de Larissa, il a été entendu que si elle montait facilement dans la remorque, Sanmar Friesians deviendrait sa nouvelle maison. À l’arrivée de Mme Ammonn, la jument a démontré son professionnalisme inébranlable en montant dans la remorque sans hésiter. Mme Hollenbach les a suivies et s’est assurée que les deux chevaux étaient bien installés. Le départ de Larissa a été très difficile pour toute la famille Hollenbach. Une partie d’eux venait de les quitter.

Mme Ammonn a bien compris ce sentiment, puisqu’elle est elle-même tombée en amour avec la jument pendant l’année et demie durant laquelle elle l’a hébergée. « Elle était belle et grandiose et semblait toujours être en mission. Elle aimait se faire laver, brosser et dorloter », a-t-elle dit. « Malgré son âge avancé, elle a toujours gardé son esprit audacieux et son désir de performer. »

Mme Ammon s’est souvenue d’une soirée en particulier, où Larissa et sa complice, Helena, se sont échappées et ont galopé dans l’enceinte du parcours de saut d’obstacles : « Elle a traversé la digue, a monté et descendu la banquette, et a franchi quelques petites clôtures. J’étais à la fois émerveillée et effrayée, parce qu’à 31 ans, elle faisait tout ça de son plein gré! »

Mme Ammonn était fascinée par toutes les réalisations accomplies par Larissa et par le grand rôle qu’elle avait joué pour le Canada. « Je l’imaginais sauter des obstacles sauvages, performer dans le stade et faire du dressage. Chaque jour passé à ses côtés, j’étais éblouie par elle », a-t-elle affirmé.

La formidable Trakehner a influencé de nombreuses vies au cours des trois dernières décennies. « Quiconque a rencontré Larissa a été influencé par elle, et elle a fait de tout le monde, y compris moi-même, de meilleurs membres de la communauté équestre. Elle était totalement unique en son genre », a affirmé M. Mandeville. La dame de fer va grandement manquer à tous ceux et celles qui l’ont aimée, ainsi qu’à toute la communauté équestre canadienne. Sa force, sa beauté, sa ténacité et son héritage, à la fois au quotidien et en concours complet, demeurent toujours bien présents.

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